LA PLACE DE L’EUROPE DANS LE SECTEUR DE LA SANTÉ HIER, AUJOURD’HUI ET DEMAIN
Aujourd’hui n’est pas un jour comme les autres, car le 9 Mai, c’est la journée de l’Europe! Il paraît donc opportun de se pencher sur la place de l’Union dans notre quotidien et en particulier, sur un sujet qui nous est cher: la santé. Pour cela, nous avons rencontré le député Européen Philippe de BACKER au Parlement Européen à Bruxelles pour recueillir son opinion sur ce sujet.
UN POIDS SUR LA SANTÉ EN PROGRESSION DEPUIS LES
DÉBUTS DE L’UE
Le poids de l’Europe dans les décisions de santé a connu des débuts modestes jusqu’aux années 80 et l’émergence de crises sanitaires majeures (SIDA, Encéphalopathie Spongiforme Bovine, affaire du sang contaminé). C’est dans ce contexte que les institutions communautaires sont apparues comme des partenaires essentiels pour relever ces nouveaux défis de santé publique. Parallèlement, une évolution juridique majeure s'est imposée. Au-delà de l'application des principes communautaires existants, le droit à la santé et la légitimité de l'intervention communautaire ont été progressivement consacrés dans les traités de Maastricht, d’Amsterdam et le projet de Constitution Européenne.
Philippe de BACKER, Député Européen |
Selon P. de BACKER, les années 90 ont observé l’amplification de cette évolution. La Cour de Justice Européenne a élaboré, à partir de 1998, une jurisprudence sur la prise en charge des soins de santé pour améliorer la mobilité des patients. Riche de cette histoire et de cette ex-périence, l'Europe, en particulier la Commission Européenne, est devenue un acteur majeur de la politique de santé, sans pour autant remettre en cause les compétences et les préroga-tives des États membres car elle n’a aujourd’hui qu’une compétence d’appui dans ce secteur.
La troisième évolution majeure concerne l’impact de la santé dans l’économie Européenne (environ 15% du PIB Européen). De fait, l'Europe a choisi d’utiliser efficacement les res-sources en matière de santé pour promouvoir la croissance et c’est en ce sens que la straté-gie de l'UE « Ensemble pour la santé » (2008-2013) a été adoptée.
Cette stratégie répond aux défis que doivent relever les pays membres en renforçant la coordination dans l'UE, en complétant les politiques nationales et en soutenant la stratégie globale Europe 2020, incluant le programme santé 2014-2020 qui repose sur quatre objectifs :
Programme santé 2014-2020
1. Promouvoir la santé et prévenir des maladies
2. Protéger les citoyens contre les menaces transfrontalières graves
3. Contribuer à des systèmes de santé innovants et viables
4. Améliorer l'accès à de meilleurs soins en toute sécurité pour les citoyens européens
Les institutions ont chacune un rôle à jouer pour garantir l’implémentation de cette stratégie. Il est impératif que les chefs d'État et de gouvernement, mais aussi les échelons régionaux et locaux, se l’approprient pleinement. Enfin, la société civile a aussi un rôle important à jouer, tant dans l'élaboration des programmes nationaux que dans leur application sur le terrain.
LA PRÉVENTION DES MALADIES ET LA PROTECTION CONTRE LES MENACES TRANSFRONTALIÈRES: LES 2 PRIORITÉS DE L’UNION EN SANTÉ PUBLIQUE
Développons un peu l’impact de cette stratégie sur nos vies de citoyens. Le député P. de BACKER constate que la protection contre les menaces transfrontalières, ainsi que la promotion de la santé et la prévention des maladies sont les 2 grandes priorités actuelles de l'Union.
La commission a déjà adopté des règles sur les menaces transfrontalières graves pour la santé afin de protéger les citoyens au moyen d’un système solide et coordonné en cas de crise (Grippe Aviaire, Ebola, E. Coli). L’action de l’UE vise à améliorer la coopération et la coordination entre les autorités nationales. Les menaces terroristes dont nous sommes hélas témoins actuel-lement en Europe nous démontrent bien de l’intérêt de cette coordination, si elles devaient se traduire un jour par l’utilisation d’armes chimiques ou bactériologiques.
Le 2ème domaine sur lequel l'Union Européenne a le plus d'influence est celui de la promotion de la santé et de la prévention des maladies.
Tabac: 700 000 morts par an en Europe et pourtant 1/3 des européens fument régulièrement |
Selon P. de BACKER, les résistances microbiennes, du fait de la prescription excessive de-puis l’introduction il y a 70 ans des agents antibactériens, « font 25 000 morts chaque an-née et coûtent 1,5 milliards d'euros en soins de santé et perte de productivité ». Depuis l'identification de ce problème dans les années 90, l'UE a mis différents programmes en place afin d'enrayer ce phénomène si néfaste et couteux pour la société.
Le combat contre les facteurs de risque des maladies chroniques notamment contre le diabète, le tabagisme, l'obésité et l'alcool, est également important. L’apposition d'avertissements sur les conséquences du tabac pour les fumeurs sur les paquets de cigarettes, les règles sur l'étiquetage des denrées alimentaires, ou encore la création d'un forum sur l'alcool ne sont que quelques exemples concrets de l'implication de l'UE en matière de santé publique.
Enfin, le cancer, avec 2.5 millions de nouveaux cas par an, est un fléau que l’Union combat avec une action portant principalement sur le dépistage et le diagnostic précoce de la ma-ladie.
ET DEMAIN : POUR UNE SANTÉ PLUS INTÉGRÉE?
Jean-Claude JUNCKER a choisi de ne pas inclure la santé comme priorité pour l'Union à son arrivée en 2014. Il est pourtant indéniable que l'Europe joue un rôle toujours majeur dans ce domaine. Il serait contre-productif de mener séparément des actions nécessaires au maintien d’une population en bonne santé. Dans ce contexte, les perspectives futures de l'UE en santé publique semblent positives.
En ce jour de fête Européenne, la question pourrait être de savoir si l'aventure communautaire peut aller plus loin pour influencer la santé privée. A cette question, P. de BACKER nous répond qu'« il parait ambitieux d'imaginer les pays déléguer leurs souverainetés à Bruxelles sur une question aussi culturelle et émotionnelle que celle de la santé, en tout cas dans un avenir proche ». L'environnement Européen actuel presque chaotique, du fait des désaccords majeurs sur le dossier migratoire et de l'imminent référendum sur le BREXIT, laissent présager un chemin long et tourmenté du « rêve Européen », pour le moins en ce qui concerne la santé de ses citoyens.
Par B.Diatta, Chr.Ferjou, E.Marandjian, S.Harries, T.Otero, et V.Bouquet